stolen youth // (maya)

y'a le calme avant la tempête, mais y'a rien avant la colère de yasuo. y'a jamais rien pour parer ses veines qui sont toujours sur le point d'éclater. c'est toujours brut, toujours bancal, toujours néfaste. il a même pas envie de retenir tout ça. surtout pas maintenant. (jamais.) il sait qu'il finira par le regretter, peut-être la nuit prochaine, quand son corps entier lui fera payer à travers des centaines de brûlures différentes. il l'aurait mérité, et dans quelques jours y'aura même plus assez de bleus pour qu'il ait envie d'y repenser.
il aurait voulu courir mais son corps est trop lourd. yasuo sait où il doit être, peu importe le temps qu'il prend. mais il connaît l'endroit par coeur, il s'y est rendu un peu trop souvent, l'âme légère. il aimait pourrir ici. avec maya. c'était agréable et ça frôlait l'idée d'être vivant correctement. parce qu'avec maya c'était décousu exactement comme il le fallait. ça l'effrayait un peu, yasuo, de voir quelqu'un qui lui ressemble autant. mais en même temps, c'était grisant. il se voyait dans les cicatrices de l'autre garçon, et ça fonctionnait, maladroitement, mais c'était quelque chose.
maintenant y'a plus rien. dans la tête de yasuo, dans son coeur, dans ses mâchoires. juste l'ardeur, le chaud et l'éclair qui se profile trop vite. il se retrouve déjà devant la porte de maya, il voudrait la cramer mais ses poings reste bloqués. il frappe, doucement, pour un garçon-tornade. une fois, deux fois, trois fois. ça s'ouvre et il s'engouffre dedans à toute allure. il prend pas vraiment le temps de crever les yeux de maya avec les siens, il attrape juste son col pour l'attirer près de lui, se sentir un peu plus brusqué dans la proximité. « c'est vrai ou pas? avec nao. c'est vrai ou pas? » le débit accéléré, le visage ruiné par une haine qu'il pourra jamais dompter.
nao, nao faut même pas la regarder. faut même pas penser à elle. yasuo pourrait crever le premier qui voudrait juste la frôler.

lendemain de soirée un peu rude, maya fait des siestes de dix minutes par dix minutes ponctuées par des changements de position incessants, d’allées et venues dans le petit appart pour ouvrir ou fermer la fenêtre et des vibrations d’son tel qu’il va finir par fracasser contre le mur. y a une meuf qui arrête pas de le harceler, il la connaît même pas et ça fait vingt fois qu’il lui dit de dégager. et PUTAIN elle insiste. elle a dit qu’ils s’étaient embrassés toute la soirée, il a dit ok j’m’en fous, puis elle a dit qu’ils avaient été plus loin, et il a dit j’me souviens pas donc laisse-moi et là elle continue de lui casser les couilles à inventer des détails qui lui donnent envie d’vomir et qu’il sait faux parce que ça fait des semaines qu’il a plus trop envie d’se taper d’autres meufs que.
il a pas envie quoi.
ok c’est bon elle l’a laissé. il dort profondément depuis plus d’une demi-heure d’un sommeil léger mais si réparateur, si vous saviez. et là. on frappe à la porte. la première fois il fait pas le lien avec la réalité, la seconde fois il fait semblant de pas avoir entendu et la troisième fois il s’lève, décidé à remettre en place cette PUTAIN de voisine à qui il a gentiment (c’est faux) répété que le mec avec lequel elle trompe son mari habite la porte d’à côté, et pas ici. il arrache presque le verrou en tirant le battant. il est encore plus énervé quand il capte qu’il s’était trompé et que c’est pas la voisine. « mais bordel c’est incroyable toi aussi t’es venu me faire ch- » il s’attendait à tout sauf à ça.
à tout sauf à s’faire attraper brutalement par le col et à s’faire secouer dans tous les sens. yasuo ? il est hyper violent alors que ça fait des jours qu’ils se sont pas parlé et il raconte n’importe quoi, le pauvre. il affabule complètement, maya y comprend strictement r i e n. « mais de quoi ??? attends mais- tu- de quoi tu parles ? mec j’comprends rien. qu’est-ce qui est vrai ? » il perd patience. déjà. « pourquoi tu m’agresses LACHE-MOI bordel mais arrête DE ME SECOUER PUTAIN. » lui aussi il l’attrape par le col, s’foutant éperdument que la porte d’entrée soit restée ouverte, il avance dans le couloir en se démenant pour le faire lâcher prise, finit par donner un gros coup d’épaule pour se défaire des phalanges en colère puis l’pousse brutalement sur le canapé. « t’as pété un câble ou quoi ? »

ça aurait pu être eux deux contre la terre entière, mais l'cerveau tout niqué de yasuo il en décide autrement. rien de rose, tout noir ou rouge carmin, rien d'autre. stupide gosse à l'éducation ratée, qui a toujours entendu ce qu'il voulait, le reste était enseveli sous un je-m'en-foutisme détestable qu'il construisait soigneusement.
maya il vient de se réveiller, comme à peu près, chaque fois. yasuo le savait, et il s'en veut pas le moins du monde de lui faire bouffer sa brutalité puérile au réveil. c'est chiant, c'est chiant parce qu'il à vraiment envie de lui casser l’entièreté de la structure de son visage. il essaie de canaliser - juste pour voir ce que ça peut faire d'avoir la tête froide quelques secondes. mais c'est difficile d'être correct. ça prend trop d'temps. « putain, fais pas putain de semblant de pas savoir. » crache t-il dans l'incompréhension de maya. il répond trop bien à sa violence. yasuo ça lui donne envie de continuer, encore plus fort, encore plus loin dans la colère. ses yeux se voilent de cette petite noirceur qu'il garde tout près de lui, à chacune occasion. il est persuadé que maya fait exprès, qu'il se fout de lui - parce que tout le monde se fout tout le temps de lui, c'est trop facile de l'énerver, on s'en joue grandement. à peine rejeté contre le canapé, le gamin argenté se relève tout de suite, réduisant de nouveau la distance juste pour projeter ses mots de flamme contre le visage de maya. « arrête de me prendre pour un con, tu fous vraiment pas de ma gueule. » il choisit de se calmer un peu. (respire, respire) et d'essayer de se concentrer au moins quelques secondes. le front presque collé contre celui qu'il a choisi comme son ennemi, il fait d'son mieux pour calmer son souffle, mais ça crie encore dans ses veines et il sait que c'est pas bon. « tu t'es tapé nao? » ça lui écorche la gorge de le dire, personne, personne touche à nao, personne à l'droit, c'est comme ça c'est une règle. et puis surtout pas maya. yasuo il le connaît, il sait quel genre de mec c'est, et quel genre d'impact il peut avoir sur nao, et il ose pas imaginer comment ça peut être entre eux, ça lui donne juste la gerbe, c'est pas tripant. « tu te l'es tapée? plusieurs fois? » il sonne comme un parent trop con pour laisser un proche vivre comme il le souhaite.
il laisse personne vivre yasuo, faut que tout le monde crève de la même manière, c'est tout. et quand il voit maya comme ça, ça le démange, il se doute un peu de la vérité, et ça le rend taré.

il aurait pu gentiment lui demande d’se calmer, lui poser ses questions qui valent rien, étouffer les tensions, foutre de l’eau sur les braises, pourtant c’est pas ce qu’il fait. il en a même pas envie, à vrai dire. alors il crie plus fort, il s’indigne et n’écoute pas, le fusille du regard parce que se mettre en colère, le frapper, hurler ça fait appel à ses instincts les plus violents et ça lui demande aucune réflexion. maya n’aime pas réfléchir. il laisse l’autre se rapprocher encore une fois, leurs souffles brûlants de haine se mélangeant lorsque leurs visages aux traits mauvais, presque fous, se retrouvent à une distance ridicule l’un de l’autre. maya cherche à peine à comprendre. mais ça fait tilt petit à petit quand il l’entend prononcer plusieurs fois le nom de nao. nao. même quand elle est pas là, même quand elle lui sort un peu d’la tête faut qu’elle lui réapparaisse, qu’on la lui jette dans les bras, qu’on lui rappelle son existence. ça l’énerve. vraiment.
il sourit parce que c’est absolument pas drôle, et ça a tout d’un sourire de connard ; lui-même voudrait s’frapper s’il se voyait. « nao ? pourquoi tu m’parles d’elle ? en quoi ça te regarde ? » il savait déjà qu’elle connaissait yasuo et qu’ils étaient potes, mais il s’attendait certainement pas à ce qu’il se déplace jusqu’à chez lui et lui tape une crise, tout ça pour l’entendre dire qu’il a déjà couché avec elle. il a l’impression de revivre la même scène qu’avec jude, y a plusieurs années d’ça, mais en beaucoup plus violent. en plus malsain, aussi. « oui, j’me la suis faite. plusieurs fois, ouais. un sacré bon coup d’ailleurs. » un rire pas joyeux du tout lui échappe, le regard de l’autre s’assombrit et ça lui plaît. il devrait pas parler d’elle comme il parle des autres parce qu’elle est pas comme les autres, mais il s’en rend à peine compte lui-même, donc il risque pas d’en alerter quiconque. « mais j’vois vraiment pas pourquoi t’en fais tout un plat, mec. c’est ton ex ? j’te l’ai volée ? on partage, si tu veux ! » encore un mensonge. qu’un autre que lui l’approche et il lui refait le portrait, simplement il connaît trop bien yasuo pour savoir que c’est pas ça qui l’motive à resserrer sa prise autour d’son t-shirt. ses prunelles, à chaque instant un peu plus sombres, n’font que l’inciter à continuer. « c’est ça hein, toi aussi tu la veux ? pas besoin de t’énerver, suffisait juste de demander. » il rit franchement, cette fois-ci. il se sait détestable et écœurant. ses paupières se plissent sous la joie feinte, il est content.

il en revient pas, il en revient pas parce que maya le retient pas une seule fois de cracher sa haine. ça aurait sûrement pu être beaucoup plus calme, sans leur demander de faire des efforts extrêmes. alors yasuo il veut même pas revenir en arrière, et plutôt se trancher la gorge plutôt que de s'excuser de se comporter comme un adolescent tempétueux. son visage se détruit un peu plus dans l'intensité de la colère, surtout quand il entend les mots de maya, et qu'il témoigne de son sourire fier. ses veines elles bouillonnent, elles menacent de déchirer sa peau et d'en sortir subitement. et puis le coup il part tout seul, c'est dommage parce que yasuo il voulait attendre encore un peu, mais ses nerfs n'ont pas une once de patience. un poing contre un sourire. les jointures de son poing le lance un peu, parce qu'il y est allé fort, mais ça vaut la peine, parce que, parce que, putain, « parles pas de nao comme ça. », c'est tout. grand frère de merde qui résout tout contre ses doigts tout pétés. il faisait ça dans les rues, il faisait ça avec tout le monde. justicier pourri qui veut juste crever contre le pavé, quand il l'aura décidé.
il reste tout près yasuo, il sait que maya va rendre le coup et il s'en fout, parce que lui aussi il continuera, et il s'en ira que quand l'un des deux sera forcé de ramper. il le rattrape par le col parce que ça lui donne de l'assurance, l'impression d'être à l'avantage. alors que y'a rien du tout. c'est lui, qui est perdant, à s'emporter aussi vite. « t'es un connard, tout l'monde le sait, et nao c'est l'genre de fille à se briser pour les cons comme toi, et j'suis sûr que t'en as vraiment rien à branler d'elle. » son débit de parole s'enflamme un peu, à défaut de lever la voix trop fort. ça aurait pu être n'importe qui. yasuo aurait habituellement rejoint maya dans ses rires mauvais, parce que de base ça le dérange à peine de "partager" une fille, il s'en fout. mais là c'est pas pareil, c'est sa famille et il supporte pas, il supporte rien du tout. il anticipe sans tout savoir, il veut tout freiner de ses propres mains. « la preuve, tu parles d'elle comme si c'était un putain de morceau de viande. t'as pas à t'approcher d'elle. » crache t-il d'entre ses dents, comme avertissement qui ne servira, de toute évidence, à rien du tout. yasuo a aucune emprise d'autorité sur maya, il le sait très bien, mais il peut juste pas s'arrêter de feuler. il voulait voir si ça allait éveiller un peu l'autre garçon, le pousser à le frapper aussi, parce que c'est ça qu'il veut, yasuo. il veut les coups, plutôt que les mots encombrants qu'on projette du fond du ventre.

il la méritait tellement, celle-là. bien sûr qu’il l’a cherchée, bien sûr qu’il l’attendait. avec un large sourire sur les lèvres et des mots sales, des qui font mal. c’est pas passé. il s’y attendait, il le savait. mais c’est pas pour autant que c’est moins douloureux, pas pour autant non plus qu’il est pas en colère. il est super énervé, maya. il l’était déjà avant que yasuo ne se pointe, puis pendant tout son speech de mec vénère et même pendant leur petit jeu front contre front. ce coup, c’est juste la goutte d’eau qui fait déborder le vase. c’est violent, il aurait dû s’y attendre aussi. il s’rattrape au buffet, passe ses doigts glacés sur sa mâchoire brûlante. il a pourtant pas l’temps de dire quoi que ce soit ou d’esquisser le moindre geste que l’autre l’a de nouveau attrapé par le col et, les dents serrées, lui balance des mots (des ordres) comme des rochers. ça l’rend fou, maya, il déteste qu’on lui dise quoi faire, qu’on pointe du doigt ses faiblesses, qu’on lui prouve qu’il a merdé. quand on l’traite de connard de temps en temps il peut passer outre, surtout quand ça vient d’personne, d’éléments extérieurs à sa vie, dont l’avis ne compte pas. mais là c’est yasuo. c’est son pote, son ami. qui est en colère parce que maya ne sait pas dire que c’est pas vrai, qu’il considère pas nao comme un morceau d’viande. dans les faits peut-être, sûrement même. il lui parle pas comme à une reine, il va la voir quand il en a envie, l’ignore parfois, parle d’elle comme si elle était rien. mais au fond c’est pas ce qu’il pense. et ça, ce con de yasuo le sait pas. comment il pourrait ? maya met tout en œuvre pour que personne s’en rende compte tant et si bien qu’il se perd lui-même. et ça l’énerve d’savoir que l’autre a raison et qu’il devrait juste la lâcher, comme il sait si bien l’faire, pour qu’on puisse la réparer et qu’elle finisse par passer à autre chose. mais il le fait pas. il est égoïste. il la fait espérer, il se décrédibilise à lui-même et il s’fait passer pour un gros connard. il est tellement complexe, tout l’monde le déteste.
il grogne, animal blessé. il sourit plus, il a souri assez. « j’vois toujours pas c’que ça peut t’foutre, t’es pas son père à c’que je sache, alors laisse-la et laisse-moi. » ses phalanges s’mettent à blanchir contre les clavicules de yasuo, il se contrôle à peine, il se sent partir bientôt. « tu sais je la retiens pas, à nao. c’est pas mon précieux oiseau en cage ni ma princesse en haut d’la tour. c’est pas mon chien non plus, d’ailleurs. elle peut partir si elle en a envie, j’vais pas m’effondrer. c’est une grande fille et j’suis pas un monstre. » aveu à moitié vrai, il sait pas du tout comment il réagirait si elle lui demandait de disparaître définitivement d’sa vie, prétextant en avoir marre d’être la roue d’secours quand ça va mal, l’antidote en cas de danger de mort. il la harcèle déjà en venant chez elle sans son accord, alors il est sûr de rien. et puis yasuo lui donne un ordre. encore. et maya voit rouge. « occupe-toi de ta propre merde shigeru, y a déjà trop à faire. reste en dehors d’la vie des autres, on sait tous les deux que t’es pas un moins gros enfoiré qu’moi. » ils se valent, ça saute aux yeux. y a qu’à voir la détresse dans chacun d’leurs gestes, celle qu’ils aiment à tapisser d’éclairs, de colère.
le coup de genou est parti tout seul. maya pousse yasuo au sol pendant qu’il est plié en deux. il l’enjambe et le rejoint dans la poussière, l’attrapant par le col pour mieux lui foutre son poing dans la gueule, comme lui l’a fait un peu plus tôt. il sait pas trop dans quoi il s’engage. il est sûr de rien mais ose pas s’poser trop de questions. et c’est tant mieux, ça lui permet d’éviter les regrets.

trop facile d'crever de rage sans chercher à comprendre. se laisser porter par le courant trop violent sans essayer de se débattre une seule seconde. yasuo en était champion. c'est juste qu'il en est accro, à l'électricité qui dévore son corps à chaque fois qu'il met un coup. petits frissons qui parsèment sa chair comme s'il était déjà gagnant. que dalle. ça sera toujours la poussière. « j'en ai rien à branler de comment c'est entre vous, j'te dis juste de t'éloigner d'elle. » pour une fois que ça manque de mensonge. pour une fois qu'il a pas spécialement envie de se voiler la face, et que y'a que ses airs de justicier en carton qui refait surface. nao a sûrement pas besoin de ça, c'est une grande fille. mais yasuo il en a besoin. il a besoin du feu qui s'éveille sous la peau de maya, et du féroce qui se peint doucement dans ses yeux. la colère des autres plus grisante que la sienne. et il l'écoute, ou il l'entend juste, il est pas spécialement porté sur des explications qui pourraient avoir du sens. y'a probablement une logique quelques part, yasuo veut même pas la frôler. c'est trop tard pour les gestes qui ont du sens, de toute façon. il sentait, dans la voix de l'autre garçon, que y'avait pas vraiment de retour en arrière possible. « non mais tu comprends pas. nao elle fait partie de c'que t'appelles ma "merde" et j-- » il comprend pas trop pourquoi il s'étouffe, jusqu'à reconnaître le genou de maya et s'écraser contre le sol. il a rien pu dire pour l'insulte gratuite, c'est pas comme s'il y avait grand chose à ajouter. il a pas tord, maya.
trop lent pour se relever et anticiper le coup qui suit. mais dans son cerveau ça s'enchaîne plus vite, il reconnaît le goût métallique sur ses lèvres et honnêtement, ça le fait sacrément chier d'être le premier à se tâcher. « putain, putain de merde. » grognement enragé, les veines qui repartent dans un vacarme assourdissant. le premier réflexe c'est de donner un coup de tête dans celle qui est trop près de la sienne. ça lui lance le front mais il en a plus rien à foutre, y'a le goût du sang qui éclate sa vision et ça devient un peu plus intense qu'au début. il renvoie son poing dans le visage de maya, plutôt dans le nez, et il s'essouffle parce qu'il arrive pas à se redresser et que ça l'emmerde. il a plus la tête à articuler des mots, y'a juste ses muscles qui s'actionnent et sa tête qui se retrouve coincé par ses sons aiguës insupportables. sa respiration s'accélère et c'est dans cette cadence dangereuse qu'il se sent réellement vivant. yasuo essaie de le pousser comme il peut, c'est maladroit parce qu'il est pas foutu de contrôler son corps correctement quand ça s'enrage comme ça. il serre la mâchoire et s'applique plus ou moins à faire basculer maya sur le côté, juste pour se mettre debout et se débarrasser de tout ce qui sonnait dans son crâne. sa tête tourne moins, il passe le dos de sa main sur ses lèvres et grimace au carmin. il voit que son adversaire se relève déjà et ça l'étonne pas, il s'attaque pas à quelqu'un de faible. « j'te préviens. je pars pas avant de t'avoir vu geindre au sol. » crache t-il, en futile provocation, fonçant de nouveau tête la première.
y'a son regard qui crie "frappe-moi", juste pour que ça brûle, juste pour que ça détruise le reste encore plus fort.

c’est ridicule. leur combat d’coqs minable, leur joute verbale immature, leurs insultes qu’ils pourraient s’faire à eux-mêmes, leur caractère d’insoumis blessés par la vie. c’est juste des enfants turbulents, au fond pas des grands méchants loups ni des justiciers bienfaisants. maya il a trop à cacher, peur qu’on le cerne alors qu’il sait pas se cerner. il a si peu à perdre qu’pour lui un rien est un tout. suffirait alors que les barrières s’envolent pour qu’son tout disparaisse et qu’le rien seul lui reste. y a d’la tempête dans son regard, de la bêtise aussi sûrement. pas grand-chose de gentil, c’est plus qu’un caprice d’enfant. c’est yasuo qui parle de quelque chose dont il ne sait rien, qui lui balance à la gueule que c’est le pire mec sur terre et qu’il a tout intérêt à laisser la princesse tranquille, parce que le porc qu’il est la mérite pas. c’est maya qui a mal à la tête, probablement encore un peu bourré d’la veille, qui a pas réussi à s’faire une heure complète de sommeil, qui se sait mauvais, toxique à souhait et qui grogne parce qu’il est blessé. les poings c’est tout un langage, la colère comme un cri bien trop vivant, tellement réel que ça fait mal. et tous les deux ils savent parler qu’la violence, à base de grognements haineux et de phalanges pétées. c’est pas si anodin, c’est juste une manière de communiquer. d’aller mieux aussi, ou moins bien (souvent).
sa vue qui s’trouble quand leurs fronts s’entrechoquent, l’insupportable boucan des os contusionnés qui envoie du sang sous ses paupières. sa prise qui s’fait caresse, tellement il est perdu. mais en dessous l’autre bouge pas plus que ça ; il doit souffrir et maya ça l’fait sourire. son crâne va exploser. des insultes entre ses lèvres abîmées comme un remède contre les maux qu’on lui envoie. il encaisse les coups sans broncher, en donne aussi parfois. son épaule heurte le parquet et du coin de l’œil il aperçoit l’ombre de l’autre, déjà debout. il croit dominer. « connard. » tout tangue autour de lui, c’est affreux. pourtant quand il s’relève il laisse rien paraître, garde ses pieds bien ancrés au sol. il a beau savoir qu’il a pas l’dessus, c’est pas lui qui brandira l’drapeau blanc en premier. même quand il sait qu’il a perdu il persiste à croire qu’il peut gagner. parfois ça a du bon et d’autres fois non. « dégage de chez moi. » un grand coup dans le torse de yasuo comme le calme avant la tempête, l’dernier filet avant la chute ou son dernier rempart pour s’protéger. « tu sais c’est pas parce que tu m’le demandes que j’verrai plus nao. » il ricane comme si c’était drôle, le souffle court, le cerveau qui crise. « c’est pas parce que tu m’frappes que j’me la taperai pas non plus. » il s’est approché comme un serpent, sans s’arrêter d’le pousser, le plaque plus fort contre le mur. « si tu savais, ça m’donne encore plus envie. » il murmure, mauvais, tout contre son oreille. puis dans une ultime offense, un geste presque désespéré, il le secoue un peu, l’oblige à s’cogner contre la pierre froide plusieurs fois. « d é g a g e. » laisse-le panser ses plaies, tu les rouvriras plus tard.

yasuo il se dit que c'est encore un peu correct. pourtant, son corps entier lui dit d'arrêter de se livrer à une lutte si futile et inutile. ça commence à brûler de partout et c'est bon que dans la tête. ça pourrit lentement le cheminement de son cerveau mais il fait encore la sourde oreille. le gamin borné. un combat de chiens, la violence pour la violence, c'est tout. deux garçons qui pourraient s'crever pour un peu de passion dangereuse, juste parce que ça a l'air plus grisant que le reste dans un monde qui a rien à leur donner. ils se parlent en coups de poings et ça choque personne. comme si des contusions diverses, c'était aussi facile à comprendre que des phrases complexes. yasuo peste intérieurement. c'est dommage, que le poids de ses caprices réduisent en cendre une des seules amitiés qui tenait un minimum à son coeur. c'est du gâchis d'être si faible sous l'emprise de la colère, de se ruiner les sentiments juste parce que la brise de la tempête est plaisante. il perd son temps yasuo, il perd les autres et il se perd. c'est pas bien compliqué, c'est toujours de sa faute à lui et il fait rien pour harmoniser le désastre.
nouveau coup qui résonne, autre grognement. ça l'exaspère. d'habitude c'est pas aussi fort, d'habitude ça ronge pas la chair avec autant de flammes. peut-être parce qu'il a pas l'habitude de se battre avec des amis, ça perce l'être plus intensément que les autres fois. plutôt crever que de refaire ça. pas de regrets, juste une leçon maladroite qu'il voulait même pas intégrer dans son crâne infesté. il en a marre yasuo, parce que sa tête va exploser, parce que maya est détestable à cramer ses nerfs à la perfection. dans une réalité alternative ou ses yeux faisaient office de canons, yasuo l'aurait tué, peut-être. mais maintenant, tout de suite, il pouvait que s'étouffer dans sa colère si proprement construite, et c'était juste insupportable. les mains cramponnées aux poignets de maya, il est persuadé que son dos va se briser dans un futur proche, il peut que lui cracher au visage. il le fait. sans hésiter. « fils de pute. » colère facile, lettres faciles, feu puéril. il lève son menton et se concentre pour penser que la douleur aiguë qui lui martèle l'arrière de crâne est pas si terrible que ça. tout est terrible, ici. rien lui va, c'est à en crever. « ferme ta gueule. si ça te fait triper de te taper nao juste pour que ça me donne encore plus envie de te tuer c'est que t'es vraiment juste qu'un crevard. » mots propulsés du bout des lèvres, semblables aux balles d'un revolver rouillé. ça l'amuse plus, y'a plus rien de marrant ni dans la provocation de maya, ni dans ses veines qui tremblent. l'ordre soufflé lui arrache une énième grimace, il a pas envie de lui obéir ou de lui donner raison. il envoie son poing dans son ventre juste pour se donner une occasion de se dégager du piège, essaie peut-être d'envoyer quelque chose d'autre, ça compte plus trop maintenant. « j'en ai rien à foutre de toi. » pas si sûr que ça. « j'ai juste hâte que nao t'envoie chier et que tu te retrouves seul avec ta fierté de connard. » souhaita t-il en s'écartant considérablement. c'est fini pour aujourd'hui, le concours de rugissements. yasuo sait toujours pas ce qu'il veut, au final. il saura probablement jamais. il sait juste qu'il n'est pas désolé, et que lorsqu'il lui jette ses yeux une dernière fois, il rêve de transpercer les siens. mais y'a plus rien qui sort de sa bouche. il redoute encore d'passer pour un lâche quand il s'évapore à travers la fenêtre qu'il claque du plus fort qu'il le peut. ses poings le remercient pour les couleurs rougeâtres, mais son esprit l'insulte une centaine de fois pour être si appliqué dans la destruction.
lui, il se dit juste que c'est fini. retour au fade, au gris et à toutes les choses qui font qu'il devrait disparaître pour toujours.